Maud Larochette, diplômée en management et géopolitique, allie expertise financière et gestion des ressources humaines. Conférencière et nominée CFO de l’année 2022, elle met en œuvre une stratégie RH centrée sur l’humain pour le bien commun.
Avec Maud, nous avons parlé aujourd’hui du rôle du leader inspirant, de mise à l’échelle et de résilience, et de comment la finance peut être un levier d’épanouissement humain dans une organisation.
De la France à la Belgique, et l’humain au centre (1ère partie)
Maud, tu es une leader franco-belge (ou belgo-française), on te connaît pour ton approche intégrée de la finance et des ressources humaines. Pour commencer simplement : qui es-tu, et qu’est-ce qui t’anime à faire ce que tu fais ?
J’aime bien cette question ! J’imagine que je suis franco-belge, plus que belgo-française, puisque je suis née en France et que la Belgique est ma deuxième nationalité. C’est celle que j’ai choisie. Par contre, autant je me définis entre les deux, autant je pense que je serais plus capable de travailler en Belgique. J’aime beaucoup la Belgique, j’y ai toujours travaillé. J’aime bien ce petit côté très ouvert, peut-être un peu plus anglo-saxon dans la manière de travailler, qui fonctionne assez bien.
Et puis, mes enfants aussi. Je suis maman de deux enfants. Même s’ils ont la double nationalité et que j’y tiens beaucoup, ils se définissent comme Belges. C’est la vie. Ensuite, je ne sais pas si je me définis par un titre… C’est compliqué. Je me définis comme, j’espère, une bonne gestionnaire. Quelqu’un qui essaie de gérer sainement les choses, les situations, les entreprises, avec harmonie et équilibre. J’ai du bon sens, je crois. Et pas mal de leadership, j’espère. On me dit souvent que je suis inspirante, mais je pense que c’est parce que j’aime les gens, j’aime travailler avec eux, m’entourer, les faire avancer.
D’ailleurs, mon mantra, c’est « avance ». C’est ce que je disais à mon équipe chez NSide : on avance. Et je pense que c’est ça, mon gros moteur : le progrès, faire mieux. Et plus grand.
Entre urgence et temps long
Tu parles beaucoup de mouvement, de décision, de rythme. Comment tu fais pour gérer l’équilibre entre l’urgence, et le temps long nécessaire à la réflexion stratégique ?
C’est un grand écart, mais nécessaire. J’aide une autre scale-up en ce moment, et je leur dis souvent : « Vous avez la tête dans le guidon. » Si on ne prend pas de recul, on ne peut pas faire avancer l’entreprise. C’est très dur, je sais, d’avoir des urgences, mais il faut se forcer à créer cette barrière mentale pour réfléchir. Sinon, on tourne en rond.
J’aime bien le symbole du cercle, mais il faut qu’il avance. Il faut prendre de la hauteur. Sinon, on recommence toujours à zéro.
Grandir, s’adapter, décider
Comment fait-on pour faire grandir une organisation sans perdre le côté humain et en restant résilient ?
Quand j’ai commencé chez NSide, j’étais la première CFO, on était 20. Et après huit ans, je viens juste de quitter, on était 220. Mais présents dans plusieurs endroits du globe : aux États-Unis, au Japon, en full remote aussi. La croissance s’est faite sur plusieurs territoires, et le business model a changé : de service vers du SaaS, puis hybride. Il a donc fallu s’adapter en permanence. C’est le premier mot, je pense : s’adapter, réfléchir, itérer, prendre des décisions rapides, car le monde va vite.
J’aime bien l’expression – que je ne maîtrise pas trop – qui dit que la seule constante, c’est le changement. Il faut savoir anticiper un minimum. Avoir des données, des capteurs un peu partout pour sentir ce qui se passe et proposer des adaptations.
Pendant huit ans, j’ai traversé beaucoup de choses, comme tout le monde : le Covid, par exemple. On devait décider quoi faire, quoi demander aux gens, sans règles claires. Et je savais que juste après le Covid, ce ne serait pas pareil que six mois plus tard. Donc, j’ai posé des règles en disant : « Dans six mois, ce sera différent. » C’est cette posture qui m’a permis de faire grandir l’entreprise.
Je sais que certains trouvent ça fatigant, mais moi, ça m’énergise : toujours se demander comment faire évoluer les choses. D’ailleurs, dans mon discours de départ, on m’a dit que j’avais toujours une to-do list immense, avec plein de changements. Et que ce qui était constant, c’était que j’allais toujours changer.
La finance comme levier de réflexion
Et quand il s’agit de mesurer l’impact, de savoir où on en est pour mieux repartir… tu relies tout ça à la finance ?
Oui, tout à fait, Je lie beaucoup ça à la finance. Pour moi, la finance crée des momentums de réflexion. Les années fiscales, les clôtures de comptes, les budgets… Ce sont des temps imposés qui permettent de poser une base de réflexion.
Chez N-Side, on commençait le budget six mois à l’avance. Dans une startup, c’est rare. Mais pour moi, c’était un exercice d’itération, de questionnement : qu’est-ce qu’on veut faire, atteindre, mettre en place ?
Je n’ai jamais vu la finance comme la police. Peut-être qu’on me le reprochera, mais je ne suis pas là pour faire la police. Je fais confiance aux gens. Et comme ils se sentent responsabilisés, ils le sont. La finance permet ces momentums où les équipes réfléchissent à ce qu’elles veulent faire, comment, pourquoi. Ça rejoint donc les ressources humaines. Créer ces temps de décision partagée et de responsabilisation, c’est commun aux deux mondes.
La finance comme levier de confiance, plutôt que de contrainte.
Nous avons continué à discuter avec Maud Larochette, voir la 2e partie de l’interview. . Cliquez sur le lien de l’épisode pour entendre l’intégralité de la discussion.